Dans cent ans, lorsqu'on rappellera aux nouvelles générations dans quelles conditions le trafic routier s'écoulait sur certaines autoroutes, une frayeur rétrospective les ébranlera pour sûr , en imaginant leurs grands-parents confrontés à ce défi!
D'ailleurs projetons-nous dans ce futur. Je me fais chroniqueur anticipé et provisoire de cet épisode.
Au début du siècle dernier , les autoroutes étaient ouvertes à presque tous les véhicules automobiles. Petites voitures, camionnettes, berlines de grosse cylindrée, motos, bus, véhicules avec remorques, caravanes, semi-remorques de 20 tonnes, l’asphalte à deux ou trois voies était accessible, et simultanément, à quasiment tous les engins roulants, moyennant péage. Seuls les vélos, Solex et autres cyclomoteurs étaient proscrits, ainsi évidemment que les véhicules à traction animale et les tracteurs agricoles. Ce trafic hétérogène s'avérait particulièrement pittoresque lors des grands départs ( et retours) estivaux...
Le trafic fluide que l'on observait sur certains trajets remarquables du centre de l’Hexagone et lors des dimanches qui interdisaient l'accès aux camions, pouvait tromper le conducteur et même l'enthousiasmer d'une conduite sereine en traversant des paysages attrayants, voire sublimes lorsqu’ils étaient « survolés », comme sur le viaduc de Millau par exemple..
Mais pour les habitués ou usagers d'autres axes périphériques ou de grand transit, la quiétude se dissipait immédiatement face aux dangers d'un « melting-pot » proprement anarchique. Imaginez cette autoroute dénommée alors A9 qui supportait dans le sud le trafic régional et national intense, mais était en outre la voie de transit de multiples camions étrangers immatriculés dans les pays extrêmes de l'Europe, Hongrie, Pologne, Roumanie, Portugal, Espagne, qui transportaient denrées et équipements dans les deux sens et réciproquement...
Les chauffeurs soumis à des exigences patronales et à l'impatience de retrouver leur terre familiale forçaient leur vitesse et les doublements à la limite des signalisations. Ainsi, sur une portion à trois voies, il était coutumier d'avoir à affronter de véritables convois qui en phagocytaient deux , parfois sur plusieurs kilomètres . Sur des portions à deux voies, au doublement autorisé ( c'est-à dire, non spécifiquement interdit par panneaux) les dépassements surprises et besogneux stoppaient une hypothétique fluidité aux véhicules légers et créaient de redoutables et dangereux bouchons. Qui se concluaient assez fréquemment en carambolages pittoresques , et souvent désastreux !
Heureusement , aujourd'hui et grâce à de nombreux acteurs qui ont œuvré dans un passé plus récent pour la protection des usagers , en même temps que de la nature, cette hérésie routière a pratiquement disparu du réseau tricolore.
Sur les itinéraires à forte vocation économique, des voies dédiées et exclusives ont été créées , afin de séparer les véhicules selon leur tonnage et leur limitations de vitesse. Ainsi sur l'ancienne A9 Languedocienne rebaptisée Domitienne , ces choix ont été appliqués très tôt , vers les années 2010 , lors des pharaoniques travaux du doublement autour de la ville de Montpellier..
À ce grand progrès vinrent s'ajouter les bénéfices de la COP 21 dont la France put s'enorgueillir à l'époque. En effet plusieurs mesures drastiques et attendues furent prises alors pour l'amélioration de l'environnement.
La première fut de limiter les transits par des restrictions sur les tonnages transportés par voie routière , particulièrement par des véhicules immatriculés à l'étranger. La bataille fut rude avec la Commission européenne toujours accrochée à la libre circulation, mais les arguments ( le chantage) écologiques avancés par des hommes ( et femmes, dont Ségolène) politiques d'alors, très déterminés et pugnaces furent convaincants !
La seconde fut l'obligation de convertir tous les véhicules utilitaires à la motorisation hybride, ou mieux encore électrique.
C'est cette dernière novation révolutionnaire qui remit en service autorisé l'usage de klaxons ( interdits en 2027), dont les deux tons étaient modulables selon le tonnage du véhicule. Au bénéfice de la pureté de l'air, cette nouvelle petite pollution épisodique, mais interdite en zone urbaine, parut alors minime au législateur de l'époque...