Cher François,
Vous me pardonnerez en premier lieu de rendre publique cette lettre privée, mais je le fais avant que quelque media fouineur la révèle en altérant mes propos.
Je m’adresse à vous avec d’autant plus de liberté que je n’ai pas voté pour vous, ce que votre ministre de l’Intérieur (que j’avais malicieusement soutenu aux primaires du PS) a du vous rapporter. Mais comme j’accepte le choix démocratique fait par une majorité en 2012, je vous considère donc comme mon président normal, en même temps que citoyen ordinaire, comme vous vous êtes plu à le rappeler.
C’est donc au second que je confie cette missive, en espérant que vous en ferez part à votre double présidentiel que cela concerne au premier chef d’état.
Depuis que votre seconde liaison a été diffusée par une presse à sensation, j’ai entendu des voix multicolores clamer que la vie privée doit être protégée, fusse-t-elle celle du locataire de l’Élysée, lequel n’est pas assigné à résidence ! Je serais prêt à faire chorus si votre situation matrimoniale complexe était restée totalement obscure aux commentateurs agréés. Ou alors clarifiée officiellement par un mariage tel que vous l’avez recommandé à tous et toutes !
J’ai toujours admiré votre sens du compromis qui vous a permis de louvoyer entre sirènes et récifs jusqu’à amarrer votre bateau à la bitte la plus prestigieuse, au 55 rue du Faubourg-Saint-Honoré. Mais reconnaissez que l’anonymat du palais n’est pas aussi imperméable que celui de l’Hôtel départemental de Corrèze et qu’un scooter même camouflé « djeun » ne passe pas inaperçu, sortant dans l’avenue Gabriel…
Ce que l’homme public doit à l’homme privé est donc dans votre cas incontournable, même en deux roues. Les Français toujours avides de belles histoires croustillantes sont également très attachés à la stature de l’homme qui les représente. C’est le paradoxe et l’exception cul-turelle de notre pays. Les habits d’un président tel qu’ils le voient ne peuvent vêtir en même temps ce qu’un essayiste contemporain a désigné comme « les deux corps du roi »
Cette dualité corporelle qui s’applique aussi à l’autre sexe réclame une stratégie de précaution à laquelle vos conseillers les plus avisés n’ont pas réussi, semble-t-il, à vous faire adhérer ? À votre décharge, je reconnais que votre compagne, auto-déclarée « Première Dame de France », et adoubée comme telle par les médias protocolaires et par trop obséquieux, ne vous a pas rendu la gestion de votre vie privée très facile.
Un média particulièrement à part dévoile aujourd’hui que le nid de vos amours parallèles ne serait pas blanc comme vierge et que votre amie et beauté juvénile le devrait à un bailleur de l’ile du même nom, à la réputation un rien sulfureuse ? Je n’en crois évidemment pas un mot, ce magazine en ligne cherchant l’audience comme tous, en se drapant dans les habits de la morale que vos propres partisans prônent si souvent. Et je fais confiance, comme vous à votre ministre de l’Intérieur, pour baliser vos parcours et sécuriser vos lieux de détente.
Je comprends que votre situation ne soit guère plaisante et que le prix à payer pour un bonheur normal sinon légitime soit bien élevé en l’occurrence. Je compatis volontiers pour l’homme, celui à qui j’écris, mais je dois à la sincérité de rappeler à l’autre, celui qui est en lumière, que nul ne l’a obligé à accéder au poste où il est. Et je me permets de rappeler aux deux cet adage si populairement réaliste: on ne peut avoir en même temps le beurre et l’argent du beurre …
Je vous souhaite, cher François, un prompt rétablissement républicain, pour le bien et l’image de la France.