J'envie les lycéens de notre époque! Ouverts au large monde grâce au Web, fins stratèges avec leur entrainement au combat sur Nintendo, sens critique acéré autour de débats-coca au café du coin, esprit d'analyse affirmé sous l'autorité complaisante d'enseignants éclairés , et surtout grand esprit d'équipe derrière les bannières colorées d'un avenir justement revendiqué.
J'envie leur aisance, leurs connaissances, leur maturité , leur oreille musicale, leur complicité, leur sens de la fête. Les jeunes filles qui ont des allures de femmes ont gagné sur leur congénères masculins un ascendant qui est une juste revanche contre l'obscurantisme machiste dans lequel furent maintenues leurs aïeules si longtemps. Libérées, elles s'expriment! Avec leur corps, avec leur voix, avec leurs poings!
J'envie leur implication responsable dans les grands défis et leur réaction aux injustices. Ils ont gagné la liberté de sortir de leurs établissements en formant des groupes revendicatifs, peuvent bloquer l'accès au écoles, réprimander des professeurs indigents, se joindre aux adultes pour contester des lois absurdes ou inéquitables. Depuis 1968, ils peuvent insulter l'autorité!
J' admire leur sens des responsabilités et leur exigences pour l'avenir.
Certes, ils expriment leurs idées et revendications de manière parfois brouillonne. Les « post », « tags » et autres « SMS » manquent de rigueur orthographique et de ces belles formules qui furent pour les générations précédentes le miel des échanges épistolaires. Ils vont vite et droit au but, quitte à se casser le nez sur un obstacle pour eux transparent..
Il me revient en comparaison le souvenir du lycéen que j'étais durant ces années anciennes que l'on qualifie de « glorieuses ». Pauvre niais, enfermé dans le cycle infernal d'un internat, comme l'ouvrier sur sa chaîne à Billancourt. Astreint à des horaires de couvent, habillé d'une blouse grise et obligatoire, surveillé durant les heures d'études, interrogé par des profs autoritaires et pointilleux, souvent maniaques , parfois machiavéliques et toujours exigeants. Je vous parle d'un enseignement public où les élèves étaient odieusement soumis au dogme de la compétition et à la culture des résultats. Sans aucun recourt d'association de parents ou autre ONG compatissante...
Lors , le leader à suivre ou battre était le major de la classe. S'endormir le soir était d'une simplicité ordinaire, la fatigue intellectuelle d'une journée dense en maths, physique, littérature, dessin, langue étrangère, (pour moi, l'allemand de la réconciliation..), chimie et autres exercices pratiques valant bien trois cuillères de Théralène..
Le baccalauréat était difficile et odieusement sélectif. Il ne suffisait pas pour intégrer une autre école, d'ingénieur ou autre. Mais il était la revanche offerte au labeur des parents qui rêvaient à juste titre d'un avenir meilleur pour leurs enfants. Ce qui se vérifiait assez souvent.
Quand on entrait dans la vie active, sans vaines et longues recherches il est vrai, l'implication dans un monde compétitif aux exigences élevées ne laissait guère de place à la réflexion sur le poids des cotisations et le niveau de revenus à la retraite. D'ailleurs c'était une notion très diffuse pour ne pas dire totalement virtuelle, au delà de l'horizon d'une vie d'adulte à construire.
J'envie les lycéens , mais à vrai dire, pas autant que çà......